jeudi 3 novembre 2011

Souvenons-nous de l'allemand. Erinnerung an Deutschesprache

De nos jours, l'anglais est incontournable.

Qui n'a pas entendu mainte fois cette phrase, assenée doctement sur tous les tons?
.............................................................................................................


C'est bien ce que je pensais.

Incontournable pourquoi?
Parce qu'on nous l'impose comme deuxième langue partout et le pire, c'est qu'il n'est même pas utile de le parler bien. Au moins, au temps béni où le français régnait sur les cours d'Europe et d'ailleurs, on ne le massacrait pas.

C'est vrai que c'est pratique, l'anglais et en plus, c'est très facile de le parler mal. Mais cette lubie est en train de faire disparaître la pratique des autres langues et la curiosité pour les cultures non anglo- saxonnes.
Sous prétexte que tout le monde bredouille plus ou moins l'anglais, on devient paresseux et les autres langues passent à l'as. Et par la même occasion, d'autres manières de penser, d'autres mécanismes linguistiques et toute la gymnastique passionnante qui l'accompagne.

Cette élagage commence à l'école où, dès le CE1-CE2, l'enrôlement commence. Le maître n'en parle pas un mot? Qu'à cela ne tienne, dans le cadre de la polyvalence des enseignements, il doit savoir enseigner une langue quand même (qu'il se démerde et après moi le déluge). L'anglais de préférence.
Et puis l'industrie du cinéma nous martèle du film anglophone en masse. Il n'est pas toujours mauvais, mais petit à petit, forcément, on s'oriente.
Pareil pour la chanson. Même excellente.

Donc moi, je soutiens l'allemand à fond.
A la fois par réaction et dans ce cas, je soutiens aussi le grec, le hongrois, le tamachek et le serbo-croate..mais pas seulement.

L'allemand est une langue pleine de ressources et en plus, elle est ENCORE accessible dans un âge relativement tendre. Plus pour longtemps.
En principe, tout un programme d'amitié franco-allemande, de soutien à la langue allemande, de promotion de la culture allemande devrait tapisser d'un lit de roses tout parcours scolaire germanophone.
Il n'en est rien.
En sous-main, un sabotage pur et simple est en train d'imposer l'anglais partout et IL FAUT SE BATTRE pour apprendre l'allemand.

Allez, je vous raconte deux petites histoires bien tordues. On se détend.

Fut un temps, une dame allemande venait enseigner l'allemand dans ma classe. Elle était compétente et sympa. Elle s'occupait de CM1. En cours d'année, le collège du secteur annonce qu'il ferme la sixième allemand LV1. En toute logique et dans le cadre de la continuité des enseignements, les enfants qui apprenaient l'allemand en CM1 ont continué toute l'année...et encore en CM2. Ils étaient ultra-motivés, sachant qu'ils allaient devoir se mettre à l'anglais en catastrophe en sixième et oublier l'allemand. Et que dire de la pauvre dame?


L'autre histoire: ma fille s'est vue imposer l'anglais en sixième, avec la promesse de faire de l'allemand en quatrième. Elle entrait en classe musicale et on nous a dit crûment que c'était à prendre ou à laisser: l'allemand ou la classe musicale. Vu comme ça, on n'a pas trop discuté. Ça commençait mal.
Arrivée en fin de cinquième, voilà-t-y pas qu'on nous impose l'espagnol. Ben voyons! Il a fallu batailler très méchamment (mais alors, très!) pour arracher le droit à l'allemand. Et quand je dis arracher, c'était avec des lambeaux de couenne avec. Vicelards et ignards......

Pourtant l'allemand est une langue  passionnante.
D'abord, c'est la seule langue à flexion parlée, enseignée avant 15 ans. Le latin, c'est bien gentil, mais ça reste livresque.
Ceux qui ont appris l'allemand jeunes n'ont ensuite aucun mal à se mettre aux langues slaves, au grec et autres langues de métèques ombrageux.

Savoir l'allemand ouvre l'esprit à l'Europe des expressionnistes, du Sturm und Drang, du Bauhaus,  d'écrivains, peintres, de musiciens géniaux.... Kafka, Stefan Zweig, Goethe,

                                                                        Klimt,


                                                                         Mozart

                                                            ..s'exprimaient en allemand.

Et puis c'est une langue en kit follement intelligente: grâce à la maîtrise de suffixes et des préfixes, on fabrique ses mots, on nuance à l'infini, on enroule et déroule les concepts au gré de sa propre fantaisie. Impossible de faire ça avec l'anglais. Impossible d'aller aussi loin dans la précision des pensées. Pas étonnant que l'allemand soit la langue de la psychanalyse et de la philosophie.

IL FAUT DÉFENDRE L'ALLEMAND!

Et là, je dégaine encore une pétition, que je signe la première. Dommage qu'ils nous baratinent avec leurs histoires de partenaire économique et d'avenir de l'UE. C'est mal venu et ce n'est pas ça le plus important, à mon avis.
Passons outre et portons notre regard au-delà.

http://www.petitionpublique.fr/?pi=P2011N6841


Erlkönig
Johann Wolfgang Goethe 

Wer reitet so spät durch Nacht und Wind ?
Es ist der Vater mit seinem Kind;
Er hat den Knaben wohl in dem Arm,
Er faßt ihn sicher, er hält ihn warm.
Mein Sohn, was birgst du so bang dein Gesicht ? -
Siehst Vater, du den Erlkönig nicht ?
Den Erlenkönig mit Kron und Schweif  ? -
Mein Sohn, es ist ein Nebelstreif. -
»Du liebes Kind, komm, geh mit mir!
Gar schöne Spiele spiel ich mit dir;
Manch bunte Blumen sind an dem Strand,
Meine Mutter hat manch gülden Gewand.«
Mein Vater, mein Vater, und hörest du nicht,
Was Erlenkönig mir leise verspricht? -
Sei ruhig, bleibe ruhig, mein Kind;
In dürren Blättern säuselt der Wind. -
»Willst, feiner Knabe, du mit mir gehn?
Meine Töchter sollen dich warten schon;
Meine Töchter führen den nächtlichen Reihn
Und wiegen und tanzen und singen dich ein.«
Mein Vater, mein Vater, und siehst du nicht dort
Erlkönigs Töchter am düstern Ort? -
Mein Sohn, mein Sohn, ich seh es genau:
Es scheinen die alten Weiden so grau. -
»Ich liebe dich, mich reizt deine schöne Gestalt;
Und bist du nicht willig, so brauch ich Gewalt.«
Mein Vater, mein Vater, jetzt faßt er mich an!
Erlkönig hat mir ein Leids getan! -
Dem Vater grauset's, er reitet geschwind,
Er hält in den Armen das ächzende Kind,
Erreicht den Hof mit Mühe und Not;
In seinen Armen das Kind war tot.
Le Roi des Aulnes
Johann Wolfgang Goethe 

Qui chevauche si tard dans la nuit dans le vent ?
C'est le père avec son enfant,
Il serre le garçon dans ses bras,
Il le tient fermement, il le garde au chaud
Mon fils, pourquoi caches-tu ton visage d'effroi ?
Père, ne vois-tu pas le Roi des Aulnes ?
Le roi des Aulnes avec couronne et traîne ?
Mon fils, c'est une traînée de brouillard.
Toi cher enfant, viens, pars avec moi !
Je jouerai à de bien jolis jeux avec toi,
Il y a tant de fleurs multicolores sur le rivage
Et ma mère possède tant d'habits d'or
Mon père, mon père, n'entends-tu pas
Ce que le Roi des Aulnes me promet doucement ?
Calme-toi, reste calme, mon enfant,
Le vent murmure dans les feuilles mortes
Veux-tu, gentil garçon, venir avec moi ?
Mes filles doivent d'attendre déjà
Mes filles mènent la ronde nocturne,
Elles te bercent, dansent et chantent
Mon père, mon père, ne vois-tu pas là-bas
Les filles du Roi des Aulnes cachées dans l'ombre ?
Mon fils, mon fils, je le vois bien,
Les saules de la forêt semblent si gris.
Je t'aime, ton joli visage me touche,
Et si tu n'es pas obéissant, alors j'utiliserai la force !
Mon père, mon père, maintenant il me saisit
Le Roi des Aulnes me fait mal.
Le père frissonne d'horreur, il chevauche promptement,
Il tient dans ses bras l'enfant gémissant
Il parvient au village à grand effort
Dans ses bras l'enfant était mort.

2 commentaires:

  1. Je ne peux être qu'avec toi, hélas à force de ne plus parler le Teuton, j'ai des gouffres de vocabulaire qui fait bien marrer ma famille.

    Un jour, impossible de me souvenir du mot mouchoir, alors j'ai inventé un (rigole pas !) Nasentuch : un chiffon pour le nez...pour le Taschentuch : tissu de sac à main. Bref j'ai une imagination sans borne et comme j'ai un accent français, on me pardonne tout avec un sourire attendri : ah ces français, quand ils parlent, c'est tellement attendrissant.

    RépondreSupprimer
  2. Et puis les Allemands ont des mots qui claquent comme das Fluch la malédiction ou qui caressent comme die Sehnsucht la mélancolie.

    Et puis des légendes tragiques comme on en fait plus, des héros assassinés lâchement, des dragons, des forêts impénétrables, des Dieux pleins d'humour noir, des nains habiles, des chevaux à huit pattes, des épées magiques, l'Or des Nibelungen qui brille toujours dans les flots du Rhin et des filles qui peignent une chevelure de soleil sans fin en haut des rochers.

    Mais c'est aussi toute une mentalité qu'on devrait apprendre au premier cours de langue.

    Der Bauer, c'est le paysan. Chez nous, latins, c'est péjoratif. Dans les mentalités germaniques et scandinaves, quiconque ne sait pas faire fructifier la terre est considéré comme un couillon. Le Viking cultive sa terre entre deux raids. Le bondi (fermier islandais), c'est celui qui fait le lien entre le sacré et l'humain. Le reste, c'est du pipeau. Si bien que le village, c'est By, terminaison bien connue en Grand-Bretagne pour les villes. De bondi, on sort le verbe germanique être "ich bin"(anglais to be), et aussi bauen (construire),et building et to build, car qui ne sait pas être un bon paysan ne saurait "être vivant" tout simplement. Toute une philosophie !

    RépondreSupprimer

Vos commentaires sont les étoiles scintillantes de ma galaxie. Si toutefois des météorites menaçaient de fracasser ce modeste espace de parole, je me réserve le droit de les renvoyer dans les étendues glacées de la blogosphère. Moi, Io, ne saurait être tenue pour responsable de leur composition ni de leur destin