samedi 22 octobre 2016

Au fait, ça travaille combien de temps, un maître d'école?

Foutus feignants de profs!
Rendez-vous compte, ma bonne dame, ces gens-là travaillent six mois dans l'année et sont payés cher pour ce qu'ils font.
C'est ce qu'a dit Sarkozy, Mâme Jebavedesvipères, le 18 octobre dernier. Donc c'est vrai.

Effectivement, Sarkozy au mieux de sa forme a recommencé à nous asséner ses vérités.
Tout le monde sait que les profs ne foutent rien la moitié de l'année. Ils ont aussi des dents de loup qui poussent les nuits de pleine lune et font des orgies avec Belzébuth certains soirs de Sabbat.

L'équipe pédagogique en réunion de cycle du dernier vendredi.

 Bon, alors d'abord, un prof des écoles (beurk, quel appellation odieuse!), ça gagne dans les 2300 euros par mois après 20 ans de boîte, quand son déroulement de carrière a plutôt bien roulé.
Pour les profs certifiés, en principe c'est pareil, puisque le statut des enseignants du primaire sont censés être alignés dessus. En fait, non, c'est pas pareil: les profs du secondaires ne se farcissent pas la surveillance des récréations, ont des primes de conseil de classe, de tutorat...mais là n'est pas le sujet. Sarkozy a déjà décroché.

 

Je me suis amusée à faire un petit calcul. Combien d'heures hebdomadaires est-ce que je travaille chaque semaine?
Allez Sarkozy, on se concentre!

 

J'ai un CM2, ce qui nous donne:
   26 h de classe par semaine, comme tout le monde dans le primaire.
+ environ 12 heures de préparations et corrections confondues. Je passe systématiquement une bonne heure, voire plus, sur le temps de midi, pour corriger. Le soir, ce n'est jamais moins d'une heure trente, pour préparer et corriger. Le matin, j'arrive toujours 20 à 30 minutes avant le début des cours pour tout mettre en place, préparer le tableau, mettre sur les tables les travaux corrigés...
+ 30 minutes bien tassées de rencontre avec les parents.
+ Tout le bazar de formations obligatoires, APC (Aide personnalisée supposée aider les élèves en difficulté à raison de deux fois 30 minutes par semaine, sur le temps de midi), réunions et j'en passe: 108 heures annualisées réparties sur 36 semaines de classe. Ça va chercher dans les 3h par semaine.

Sarkozy va nous dire combien ça fait, tout ça. Attention Sarkozy, il y a une division à faire quelque part! Vas-y doucement.
26 + 12 + 30mn  + (108/36= à peu près 3h)= 41,5 heures. Allez, arrondissons à 42 heures.

S'ajoutent à cela:
  • - les temps de surveillance de récréation (environ 3 heures par mois soient 40 à 45 minutes par semaine), 
  • - le concoctage Ô combien exaltant des livrets par compétences qu'on nous oblige à présenter ainsi, quand bien même c'est abscons, mensonger et chronophage, 
  • - la paperasse qui accompagne la moindre sortie, le plus petit projet ou quoi que ce soit de ce genre. 
Je pense qu'on peut rajouter au bas mot une solide heure à notre compte, déjà rondelet.
Nous arrivons à 43 heures de travail hebdomadaire, et encore, j'ai un peu de bouteille et une foison de documents déjà prêts.

Sarkozy m'objectera que les profs se vautrent dans un temps de congés obscène, tel Hannibal dans les délices de Capoue.

L'équipe pédagogique prise en flag: vacances de juillet, séjour tout compris spécial profs.
 
Certes, à défaut de treizième mois, de comité d'entreprise, de médecine du travail, de souplesse lors des moments importants de la vie (on m'a royalement accordé trois jours pour le mariage, dont un seul rémunéré), de droit à la mobilité, nous bénéficions de 16 semaines de congés. C'est-à-dire quatre mois.
Ça y est , Sarkozy tient son os!

Notons tout de même qu'une partie de ce temps est consacré au travail de correction, préparation... ça dépend bien sûr de l'engagement de chacun. Je consacre deux à trois journées des petites vacances à faire mes affichages, peaufiner les détails et devinez? Corriger, préparer...
Pendant les grandes vacances, c'est très variable: entre quatre et douze jours sont nécessaires. Je suis loin d'être la seule.
Les 16 semaines ont déjà un peu rétréci.

J'ajouterai un détail important.
Enseigner ne consiste pas à rester assis sur sa chaise devant un ordinateur, avec son petit café et la collègue à qui raconter sa dernière recette de cuisine. Je sais, je caricature.
N'empêche.
Là, il s'agit de tenir à la force du, de...charisme, autorité, potion magique, ce que vous voudrez: une classe.
Une classe, c'est entre 25 et 30 mômes pas forcément disposés à faire ce qu'on leur demande, moyennement emballés à l'idée d'écouter ce que le prof dégoise, la plupart du temps soutenus contre vents et marées par leurs parents. Il y a des mimis et des parents sympas, bien sûr, mais il arrive surtout de tomber sur les spécimens cités en premier. A cette recette assez basique, il manque l'ingrédient vedette: le gamin handicapé mental et/ou engoncé dans des troubles du comportement bien carabinés. 
Au pire, un prof se trouve livré, seul au monde, à une horde de sauvages qui jouent au foot dans la classe (histoire vraie, mais pas dans la mienne), s'insultent et/ou se battent comme des apaches, traquent la moindre occasion de contrer le malheureux prof sur des questions délicates, le plus souvent religieuses. C'est rare en CP, mais j'ai connu ça en CM1 et CM2.

Sans les vacances, un prof ne peut pas tenir. Si on les diminue, il faudra instituer des jours de récupération, comme ceux qui font les trois huit et c'est inorganisable, ou engager beaucoup de remplaçants pour compenser les absences pour maladie ou démission.

Ceci dit, je ne me plains pas. C'est un chouette métier.
Je voudrais juste que les politiques (et Sarkozy en particulier, suivi de près par Najat) cessent de dire n'importe quoi.

Maintenant, interro écrite. On va voir si Sarkozy a écouté. N'oubliez pas d'écrire la date.
Najat et François, qu'est-ce que je viens de dire?


4 commentaires:

  1. Super l'équipe pédagogique en réunion et celle en vacances c'est le top.
    Maintenant je comprends pourquoi il y a autant de journées pédagogiques :)))))))
    Bisous !

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    1. Chhhhhht! Faut pas le dire! :)))))

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    2. Est-ce bien sérieux, cette réunion juchée sur des balais...est-ce l'avant-première d'un ÉPI EPS/Physique : tout corps tombant de haut...? Ou une partie de quiddich chez les naturistes ?

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    3. C'était le sabbat pédagogique du vendredi soir. Mais on pourrait aussi y voir aussi un EPI inventif. Ton idée est à creuser. Je vais la soumettre à la prochaine réunion de liaison Ecole-Collège.

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